Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Mot du président

 En 2005, 60 ans après l’inauguration du lycée en baraques sur la place de l’Harteloire, entourée des ruines de la ville anéantie, Claude Spagnol, Jean-René Berthemet, encouragés par le souhait d’Edouard Landrain, député de Loire-Atlantique, lancent l’initiative de la création d’une association des anciens élèves de cet établissement hors normes.

Un article dans le Télégramme, l’exploitation d’une première liste établie en faisant appel aux souvenirs de quelques-uns uns, permirent de réunir en assemblée générale constitutive, le 30 septembre 2005, une soixantaine de membres.

 Depuis, l’organisation de deux sorties, l’une en avril 2006 à Kerhuon, l’autre en août au Faou, à laquelle ont pu se joindre des anciens ayant quitté la région, mais qui lui restent fidèle pour la période estivale, ont permis d’élargir le recrutement et de tracer un programme d’actions dans lesquelles l’association pourrait s’impliquer, conformément à ses statuts.

Mais l’association dont le but est la convivialité retrouvée, ne sera active et vivante que si ses différents membres sont prêts, notamment à partir de ce site informatique, à apporter leur contribution à cet intérêt de se retrouver et d’échanger  les souvenirs communs malgré le temps qui nous a séparé.

 

 

 

 

 

 

                                 Albert LAOT

Recherche

Conseil d'admin

Président: Albert Laot
Vice-président: Claude Spagnol
Secrétaire: Yvette Prigent
Trésorier: René-Louis Guiavarch
Trésorier adjoint:: Jean-René Poulmarc'h
Courrier: Annick Blaise
Membres:
Jean-Noël Berthemet
Daniel Gravot

René L'hostis
Bernard Oliveau
Michelle Péron-Pochet
Jeanne Romeur

Archives

19 février 2011 6 19 /02 /février /2011 22:08

Monsieur Borde :

“Le règlement, c’est le règlement !”

 

     Monsieur Borde fut nommé proviseur du Lycée de Brest à la rentrée de l’année scolaire 1951-52. en remplacement de Monsieur Michonneau. D’un caractère moins strict que son prédécesseur, il n’en était pas moins soucieux de la bonne marche de son établissement et, en particulier, était absolument intransigeant sur le règlement. Les textes officiels étaient pour lui la référence absolue et il ne tolérait aucune entorse à ce sujet. Plusieurs anecdotes illustrent ce comportement.

     À la rentrée de 1945, un aumônier avait été affecté au lycée en baraques afin que les élèves qui le désiraient puissent suivre l’instruction religieuse, catholique naturellement. Mais quelques années plus tard, l’effectif des élèves ayant considérablement augmenté, un second aumônier fut nommé. Certains collègues acceptèrent mal cette situation, non conforme à leurs yeux au principe de “l’école laïque gratuite et obligatoire”. Ils estimaient qu’un seul aumônier était déjà bien suffisant pour satisfaire les exigences des catholiques pratiquants. Ils n’avaient jamais osé poser la question à M. Michonneau dont ils connaissaient les convictions à ce sujet.

     À la nomination de M. Borde ils apprirent que ce dernier était de religion protestante. Ils crurent donc pouvoir saisirent l’occasion de se débarrasser de cet aumônier surnuméraire. Malheureusement pour eux Monsieur Borde, à qui ils avaient posé la question, leur opposa immédiatement un argument sans réplique :

     “Mes chers collègues, les textes officiels prévoient que si l’effectif des élèves d’un établissement scolaire dépasse un certain nombre (et il leur fournit le chiffre exact) un second aumônier devra être affecté à cet établissement pour satisfaire à la demande des familles. Or l’effectif de notre lycée atteint X élèves (à nouveau le chiffre exact) soit très largement au-dessus du seuil au-delà duquel deux aumôniers devront y être affectés. Il n’est donc absolument pas question de revenir sur le sujet”. Point final !!

     À son arrivée au Lycée, Monsieur Borde avait amené avec lui sa famille. Son épouse enseignait l’Histoire et la Géographie et ses deux enfants étaient scolarisés dans l’établissement.

     Là encore, concernant les membres de sa famille, il appliquait scrupuleusement les textes. S’il parlait d’eux avec des collègues ou des membres de l’administration, il disait “ma femme” ou “mon épouse” ou “mon fils, ma fille”. Il n’en était pas de même dans les réunions officielles et notamment les conseils de classe. Partant du fait que les textes, toujours eux, interdisaient aux chefs d’établissement de tolérer la moindre infraction au règlement concernant un membre de leur famille, ni trop de familiarité à leur égard, il appelait son épouse et ses enfants par leur nom, et d’un ton très “directorial”. Ce qui aboutissait parfois à des scènes plaisantes dont les collègues se régalaient. C’est ainsi qu’un jour, à un conseil de classe dans lequel figurait la femme du proviseur, ce dernier débuta la séance par ces propos :

     ”Mes chers collègues, avant de commencer ce conseil, j’ai une remarque importante à faire. J’ai feuilleté le cahier de bulletins de la classe que nous allons examiner et j’ai la surprise de constater que le professeur d’Histoire Géographie de cette classe n’a pas rempli les bulletins. Je demande donc : qui est ce professeur ?” (comme s’il ne le savait pas !)”

     Réponse embarrassée des professeurs : “C’est……. Madame Borde, Monsieur”.

     Le proviseur, très solennel :

     “Madame Borde, j’attends vos explications, pourquoi n’avez-vous pas rempli ces bulletins ?”

     Réponse de l’intéressée :

     “ Euh ! Monsieur le Proviseur, je vais vous expliquer……”

     Je ne me rappelle plus les raisons qu’elle avait données, mais Monsieur Borde poursuivit :

“Bon, nous allons procéder au conseil de classe, mais je vous demande, Madame Borde, de remplir ces bulletins sans faute à l’issue du conseil”

     “Bien sûr, Monsieur le Proviseur, je n’y manquerai pas !”

     Les collègues avaient toutes les peines du monde à masquer leur hilarité.

     Concernant ses enfants, M. Borde adoptait les mêmes principes rigoureux. Témoin cette scène qui eut encore pour cadre un conseil de classe. Il s’agissait de la classe dans laquelle se trouvait son fils Pierre et c’était le conseil du troisième trimestre. Étant donné sa place dans l’ordre alphabétique, le cas de cet élève apparut au tout début du conseil. Le proviseur l’annonça ainsi :

     “ Nous allons maintenant examiner les résultats de Borde Pierre. Mes chers collègues, que pensez-vous de cet élève ?”

     Réponse collective :

     “Eh bien il a une moyenne correcte dans l’ensemble”

     Le proviseur :

     “Mais je constate tout de même quelques insuffisances dans certaines disciplines. Et çà, il faut en tenir compte”.

     “Oui mais, pas trop graves et il n’y a pas de note vraiment faible”

     “Bien, vous êtes donc d’avis que Borde Pierre peut être admis en classe supérieure malgré ses insuffisances ?”

     “Oui, il est sérieux. Et en travaillant un peu pendant les vacances, il pourra compenser son retard dans certaines matières”

     “Bon, je déclare donc Borde Pierre admis dans la classe supérieure. Et nous passons à l’élève suivant”

     La suite du conseil se déroula sans incident jusqu’au cas d’une élève dans la fin de la liste alphabétique.

     Le proviseur :

     “Nous arrivons au cas de Melle UneTelle. Que pensez-vous de son bulletin ?”

     Les professeurs :

     “Ah ! celle-là, c’est vraiment un peu juste. Elle a quelques difficultés dans certaines matières”

     “Donc vous estimez qu’il faut la faire redoubler ?”

     “Oui monsieur le proviseur, nous croyons que c’est préférable pour elle”

     “Bien, je tiens compte de votre avis”

     Mais le proviseur, feuilletant le cahier de bulletins à rebours, déclara alors :

     “Mes chers collègues, je vous demande toute votre attention. Tout à l’heure quand il s’est agi de Borde Pierre, vous avez estimé qu’il pouvait être admis en classe supérieure. Or, si je compare le bulletin de Melle Unetelle à celui de Borde Pierre, on constate qu’ils sont tout à fait semblables : même moyenne générale, mêmes insuffisances dans certaines disciplines. Si donc vous avez pensé que Borde Pierre pouvait être admis en classe supérieure, il est hors de question de faire redoubler Melle UneTelle dont les résultats sont rigoureusement identiques. Donc vous devrez  vous décider : faut-il admettre ces deux élèves en classe supérieure ou faut-il les faire redoubler tous les deux ? Car il n’y a pas deux poids deux mesures”.Les deux élèves furent bien entendu admis en classe supérieure.

     Ce jour-là, trois élèves avaient commis je ne sais quelle infraction. Un pion les avait surpris en flagrant délit mais il n’avait pas pu les appréhender car ils avaient réussi à s’enfuir. Il avait fait son rapport à Monsieur Bolloré, mais n’en avait pu en identifier que deux. Les deux élèves furent donc convoqués dans le bureau du surveillant général et monsieur Borde s’y trouvait aussi.

     Comme à son habitude, le proviseur reprocha aux deux coupables leur indiscipline et leur fit tout un discours sur la nécessité d’une discipline rigoureuse etc….  Et il conclut son propos par une consigne du dimanche pour les deux fautifs. Puis il ajouta

     “Mais ce n’est pas tout. Monsieur X (le surveillant) a rapporté à Monsieur Bolloré que vous étiez trois. Je vous demande donc de me dire qui était le troisième élève”

     Les deux élèves se regardaient d’un air affolé mais aucun ne voulait répondre.

     “Allons ! insista Monsieur Borde. Il me faut le nom du troisième coupable. Il n’y a aucune raison pour qu’il ne soit pas puni lui aussi”

     À la fin, l’un des deux élèves se jeta à l’eau : “C’est Borde Monsieur le proviseur !!”

     “Eh bien ! Borde Pierre aura sa consigne comme les autres ! Bien, allez rejoindre votre classe et que je ne vous revoie plus dans de pareilles circonstances !”

     Les deux élèves ne se le firent pas deux fois et filèrent en toute hâte. Dès qu’ils furent partis, Messieurs Borde et Bolloré éclatèrent d’un rire sonore, évoquant la mine terrorisée des deux lascars obligés de livrer au proviseur le nom de son propre fils comme coupable.

     .                                                   Jean-Noël Berthemet

Partager cet article
Repost0

commentaires

Articles RÉCents

Toutes Les Photos