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Mot du président

 En 2005, 60 ans après l’inauguration du lycée en baraques sur la place de l’Harteloire, entourée des ruines de la ville anéantie, Claude Spagnol, Jean-René Berthemet, encouragés par le souhait d’Edouard Landrain, député de Loire-Atlantique, lancent l’initiative de la création d’une association des anciens élèves de cet établissement hors normes.

Un article dans le Télégramme, l’exploitation d’une première liste établie en faisant appel aux souvenirs de quelques-uns uns, permirent de réunir en assemblée générale constitutive, le 30 septembre 2005, une soixantaine de membres.

 Depuis, l’organisation de deux sorties, l’une en avril 2006 à Kerhuon, l’autre en août au Faou, à laquelle ont pu se joindre des anciens ayant quitté la région, mais qui lui restent fidèle pour la période estivale, ont permis d’élargir le recrutement et de tracer un programme d’actions dans lesquelles l’association pourrait s’impliquer, conformément à ses statuts.

Mais l’association dont le but est la convivialité retrouvée, ne sera active et vivante que si ses différents membres sont prêts, notamment à partir de ce site informatique, à apporter leur contribution à cet intérêt de se retrouver et d’échanger  les souvenirs communs malgré le temps qui nous a séparé.

 

 

 

 

 

 

                                 Albert LAOT

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Conseil d'admin

Président: Albert Laot
Vice-président: Claude Spagnol
Secrétaire: Yvette Prigent
Trésorier: René-Louis Guiavarch
Trésorier adjoint:: Jean-René Poulmarc'h
Courrier: Annick Blaise
Membres:
Jean-Noël Berthemet
Daniel Gravot

René L'hostis
Bernard Oliveau
Michelle Péron-Pochet
Jeanne Romeur

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27 janvier 2009 2 27 /01 /janvier /2009 11:10

                                                             Milieu familial: Robert Gravot naît à Brest le 22 août 1912, aîné d'une fratrie de 3 garçons. Il est issu du milieu populaire caractéristique du début du siècle dernier, “d'avant 14”. La famille est d'origine morlaisienne par le père , brestoise et de Plancoët par la mère. D'un côté comme de l'autre, on a quitté la condition paysanne depuis au moins deux générations et on est au coeur de la vie urbaine et ouvrière. Robert Gravot a un grand-père charpentier et un père ébéniste. Celui-ci a fait son apprentissage dans une fabrique à Brest puis un tour de France sans pour autant appartenir au compagnonnage. Il porte en lui tous les traits de l'ouvrier engagé dans la lutte sociale. Socialiste, admirateur de Jaurès, plein  d'aspirations révolutionnaires, travailleur acharné, il exerça toute sa vie une très forte influence morale et civique sur son fils. Il a le culte du savoir, croit en l'humanité et à la grande nécessité de “l'élévation du peuple”. Il fait, comme tous ceux qui lui ressemblent, toute la guerre 14-18 et participe à l'occupation de la Rhénanie en 1919. Il exerce, avec souvent bien des difficultés, son métier d'ébéniste jusqu'à la fin de sa vie à 80 ans.
        Enfance. Robert Gravot est à l'école pimaire Guérin l'excellent élève dont rèvent  tous les parents.Proposé et admis à l'examen des bourses, il entre par cette voie, avec seulement quatre autres petits brestois, au Lycée de Brest de la rue Voltaire comme demi-pensionnaire. Il persévère dans l'excellence, puiqu'au terme de ses études secondaires, il reçoit le grand prix d'honneur du Lycée. C'est probablement sa rencontre avec son professeur Robert Herzzkowiza, qui enseigne alors la philosophie, qui décide de son propre engagement dans cette voie.
       Études: Novembre 1930 et c'est le départ pour Rennes où vient de s'ouvrir une “Khagne”, première supérieure, au Lycée. Il y reste quatre ans,pensionnaire et boursier, en même temps qu'il suit les cours de l'Université. Ce sont des années essentielles tant par la personnalité des professeurs que par celle des “khagneux”, confrérie paticulière où l'amitié, la curiosité et l'humour comptent autant que les études. Il y rencontre comme condisciple Paul Ricoeur avec qui il selie d'amitié et dont il reconnaît très vite l'influence qu'il peut avoir sur sa propre pensée.
       Licencié ès lettres en 1934 et diplômé d'études supérieures de philosophie un an plus tard, il quitte Rennes pour Paris, en vue d'y préparer l'agrégation. Période difficile pour des raisons de subsistance (il a obtenu un prêt d'honneur de l'université de Rennes) mais extraordinaire sous l'angle des rencontres et de l'immersion dans le bouillon de culture (Gabriel Marcel et d'autres), extraordinaire aussi par les circonstances dont l'avènement du Front Populaire. C'est de même, pour lui, l'évéil à une véritable conscience de la réalité politique et de l'interrogation sur le rôle de la philosophie dans la cité.
      Après avoir effectué un remplacement au lycée de Brest, il est nommé, le 3 octobre 1936, “délégué pour l'enseignement des Lettres et de la Philosophie” au collège de Nyons dans la Drôme, alors en voie de formation.Il se marie à Madeleine Berthon, après de longues fiançailles, le 30 décembre suivant et, ensemble, ils passent une année commune à Nyons, la seule avant juin 1945. Il obtient l'agrégation le 30 septembre 1937. Il a 25 ans.
          Les années de plomb: Sursitaire jusqu'alors, Robert Gravot effectue son service militaire au cours de l'année 1938. Affecté à Guingamp puis au camp d'Auvours, près du Mans, il accède au grade d'aspirant. Nommé professeur de philosophie au lycée de Brest en octobre 1938, il y enseigne peu en raison de plusieurs rappels aux armées. Le dernier d'entre eux, en 1939, le conduit à la vraie guerre et il participe aux combats en Hollande et en Belgique. Fait prisonnier à Dixmude en mai 1940, il va connaître la captivité pendant plus de cinq ans, principalement au camp de Stablack, près de Koenisberg en Prusse-Orientale. Stablack est le camp où les Allemands ont regroupé les aspirants qui sont pour la plupart des intellectuels, parmi lesquels beaucoup d'enseignants et de nombreux étudiants. C'est un milieu qui réagit très vite aux conditions de vie imposées, qui s'organise et qui refuse de sombrer. Le plus remarquable est, sans aucun doute, l'organisation d'une véritable université où non seulement tout professeur enseigne, mais où il reste aussi l'étudiant de ses propres collègues. Les examens passés par les plus jeunes seront validés après 1945. Robert Gravot participe largement à ce mouvement: il enseigne, fait des conférences, demande constamment à sa femme de lui faire venir des livres de France. Il profite de ses collègues pour approfondir ses connaissances en histoire, mathématiques et langues. Il y a là de nombreux philosophes avec qui la discussion ne cesse jamais et jamais, sans doute, il y en eut autant dans un espace aussi confiné. Si la grande question demeure toujours présente, “à quoi peut servir une telle activité de l''esprit?”, sa réponse sera toujours la même: garder l'espoir. Il a réussi à le communiquer, cet espoir, puisque l'un de ses amis écrit alors de lui: “Il a un tel bon sens, une tellement bonne vue des choses, qu'on aime à l'avoir près de soi pour reprendre pied lorsque l'on ne sait plus si l'on marche la tête en bas ou non”.  
 De toute cette période, qui confine à l'ascèse entre barbelés, Robert Gravot, plus tard, n'en parlera que très peu et n'y fera jamais référence. Non seulement  il n'en tirera aucun titre de gloire mais surtout il la portera en lui comme la rançon d'une défaite humiliante. Pour s'en expliquer, il préfèrait renvoyer à la lecture de Marc Bloch. 
      La renaissance et l'action :  Le 15 juin 1945, Robert Gravot, libéré par les Russes et rapatrié par les Américains, revient à Brest qu'il ne quittera plus. La ville est en ruines et rien n'est reconnaissable. Tout est à reprendre et on s'accommode du surréalisme de nombreuses situations. Ainsi en 1939 ou 1940, Robert Gravot avait été “nommé et non installé pour absence” (et pour cause!) au lycée d'Angers. Puis le 3 octobre 1941, toujours en son absence, il était nommé au lycée de Rennes, en remplacement de monsieur Ricoeur, “nommé et non installé”( pour la même raison!). Mais en 1945, il ne s'installe pas à Rennes, à la suite d'une rencontre fortuite au cours de l'été avec monsieur Michonneau, nouveau proviseur du  lycée de l'Harteloire qui n'est pas encore ouvert. Monsieur Michonneau vient lui-même d'Angers (!). Le professeur n'est pas “installé” à Rennes où il n'a pu trouver à se loger et le proviseur nommé à Brest mais “installé” à Landerneau, n'a ni lycée ni professeur de philosophie nommé. Sur le chantier boueux des baraques naissantes, un pacte est rapidement scellé entre les deux hommes, pacte auquel le recteur de l'académie de Rennes donne immédiatement son accord. Robert Gravot est nommé à Brest et s'y installe.
      Cette anecdote est hautement symbolique de ce que fut alors la renaissance conjointe de la ville de Brest et du lycée. Pour Robert Gravot, il y a dorénavant indissociabilité entre son métier d'enseignant et son engagement dans la vie publique. En novembre 1945, il est appelé à prononcer un discours à l'occasion de l'inauguration des nouvelles installations en baraques: “Le lycée provisoire”. C'est un véritable appel à la reconstruction de la ville, du pays et de la culture . Il entre au conseil municipal de Brest en 1953 puis au conseil général du Finistère  en 1958. Son activité politique est alors intense mais le lycée reste sa base première. Il aime son métier et, tout autant, il aime ses élèves qui le lui rendent bien. Il aime particulièrement sa philo-lettres où, à raison de neuf heures par semaine, il tient réellement ses élèves en haleine. Comment un tel programme, celui de l'époque, pouvait-il passer dans tant de jeunes têtes? Sa réponse était que précisément la jeunesse est le seul âge où l'on peut prendre du plaisir à tenter de comprendre le monde. Pendant quelques années, il enseigne aussi en math-élem, de même qu'à l'École Navale et aux écoles techniques de la marine, milieux excellents à ses yeux pour tâter un peu de la philosophie des sciences. Ses cours sont toujours renouvelés d'une année sur l'autre et continuellement retravaillés, souvent fort tard dans la nuit. C'est un philosophe de la parole et du discours, qui délaisse sa chaire et déambule de long en large dans les allées de sa classe. Tous ces élèves s'en souviennent avec émotion, dans les baraques de l'Harteloire de 1945 à 1955 puis à Kérichen jusqu'en 1975.
     Del'effervescence des premières années d'après-guerre, il faut retenir aussi le véritable lien qui se crée entre le lycée et la vie de la cité. C'est en particulier ce qui permet le départ d'un nouveau cercle Universitaire où de nombreux professeurs, mais aussi bien d'autres Brestois, s'engagent et c'est le premier pas vers la renaissnce de la vie culturelle à Brest. Même point de départ: une baraque puis une bibliothèque, un cycle annuel de conférences, l'organisation de concerts, d'expositions, une troupe théatrale.....Robert Gravot préside le Cercle jusqu'en 1954 lorsque la Société d'Études de Brest et du Léon prend le relais.
     Puis le temps passe. Des classes supérieures sont créées au lycée, dont une classe de Lettres Supérieures où il assure le cours de philosophie. Puis surviennent deux autres évènements majeurs où son activité s'est déployée : La création, en 1962, d'une École Supérieure de Commerce, à l'initiative de la Chambre de Commerce et d'Industrie et dont celle-ci le nomme directeur (nouveau champ d'expérience pour lui) et la création d'un Centre d'Études Supérieures ( Collèges scientifique et littéraire) qui deviendra l'Université de Bretagne Occidentale). Pour poursuivre la tradition brestoise, ces établissements commencent leur existence dans des baraques au voisinage de l'Harteloire.......
     Dès la fin des années 50, tant au conseil municipal qu'au conseil général, Robert Gravot n'a cessé de plaider de toute sa conviction, pour la création d'un véritable pôle d'enseignement supérieur à Brest et dans l'ouest breton. Il y voit bien des raisons: près de la moitié des étudiants regroupés à Rennes sont des Finistériens, mais surtout, il est convaincu, dès cette époque, que la création d'un pôle d'enseignement supérieur, puis, au-delà, de recherche, est un élément déterminant du développement de la cité. Le rôle qui est le sien, aux côtés des professeurs Eugène Bérest et Yves Le Gallo, dans cette aventure, son obstination même ont porté leurs fruits. Il mettra la même conviction dans le développement culturel.
     C'est en effet ce domaine, la culture, qui sera son dernier champ d'action publique. De 1971 à 1976 il est adjoint au maire, chargé de la culture, dans les municipalités Lombard et Bérest. La vie culturelle brestoise a pris de nouvelles formes; elle s'est reconstituée puis largement diversifiée: Musée, Écoles des Beaux-arts, de musique, bibliothèques et le tout nouveau Palais des Arts et de la Culture...On est loin des temps héroïques d'il y a 30 ans. Qu'est-ce qu'une “politique culturelle” à l'échelle d'une grande ville et d'un public qui, déjà, la déborde largement? Pour Robert Gravot, deux soucis l'emportent : celui de la qualité , de la renommée et celui de l'accès du plus grand nombre à toutes les formes de la culture. Pour lui derrière ce mot, il y a le savoir, la connaissance et le bonheur.

     Il prend sa retraite de professeur en 1975 mais il reste philosophe de la vie.....pour un an seulement. Il meurt subitement un matin de novembre 1976 alors qu'il s'apprête à se rendre sur le cours Dajot inaugurer une stèle à la mémoire de son cher poète Victor Ségalen.
                                  Daniel Gravot
                                                                                                                                                 
           
  
           

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